NOUVEAU : La liste détaillée établie par Jacques CHILLON de tous les A-60 Fauconnet construits en France
Les années cinquante furent, pour la majorité des allemands, synonymes de Guerre Froide et d'insécurité politique. Pour ceux qui pratiquaient le vol à voile, elles gardent le souvenir plus heureux de la réhabilitation de leur sport favori. C'est en 1951 que le commandement des troupes d'occupation permit à nouveau la pratique des sports aériens sur le territoire de la République Fédérale. La situation du vol à voile n'était guère brillante : la majorité des planeurs construits avant et pendant la guerre avaient été détruits ou confisqués par les alliés, les structures s'étaient dissoutes, les subventions étaient supprimées. Les vélivoles allemands ne pouvaient plus compter que sur leur courage et leur esprit d'entreprise. On sait aujourd'hui ce qu'il en est advenu !
Bien qu'aucun planeur n'ait survolé le territoire allemand entre 1945 et 1951, cette période avait été fructueuse dans le sens où de nombreux projets étaient nés sur les planches à dessin. L'un d'eux, le Mü 13 E, était dû à Egon Scheibe, un jeune ingénieur diplômé de l'université de Munich et ancien membre de l'Akaflieg. Le prototype du Mü 13 E, qui était un biplace en tandem destiné à l'école et au perfectionnement, fut construit en Autriche en 1950, il suscita un si vif intérêt que sa production en série fut envisagée. Afin de mener,à bien cette entreprise, Scheibe fonda à Dachau la société Scheibe Flugzeugbau Gmbh ; le Mü 13 E, surnommé "Bergfalke I" devait donner lieu, sous différentes versions, à une production en série qui ne devait s'arrêter qu'en 1978.
Le Mü 13E dont le
prototype fut construit en Autriche est à l'origine de la
lignée des Bergfalke
Aussitôt le Bergfalke mis en production, Egon Scheibe entreprit en compagnie de Rudolf Kaiser l'étude de deux machines complémentaires du Bergfalke : le Zugvogel voué à la grande performance et le Spatz destiné à l'entraînement.
Le "Spatz" dans ses différentes versions
Le prototype du Spatz (moineau) fut étudié à la fin de l'année 1951. La conception de cette petite machine économique et performante était directement issue des connaissances acquises par Scheibe à l'Akaflieg lors de l'étude du Mü 10 Milan et des Mü 13D Merlin et Atalante.
Un Mü 13 D
récupéré en
Allemagne au titre des dommages de guerre et utilisé au
Centre
National de
Pont-Saint-Vincent. Il porte
encore l'immatriculation allemande mais un drapeau tricolore a
été appliqué
sur la dérive. Plus
tard ce planeur devait être réimmatricule F-CABM
L'originalité des machines munichoises, qui fit plus tard la réputation des planeurs et des motoplaneurs Scheibe, est due à l'association d'un fuselage réalisé en structure métallique avec une voilure et des empennages en bois. Ce procédé de construction offrait des avantages de différents ordres :
Le prototype, désigné A-Spatz, fut construit pendant l'hiver 1951-1952. Il se présentait comme un petit monoplace de 13,2 m d'envergure pesant à peine 110kg. Le fuselage, réalisé en tubes, était profilé par quelques lisses de bois ; le train d'atterrissage était composé d'un patin de frêne et d'une béquille en acier. La voilure cantilever était implantée en position médiane, son dessin comprenait une partie rectangulaire sur le tiers de l'envergure suivie d'une partie trapézoïdale à extrémité arrondie. Le profil était du type Mü 14 %. L'aile, construite en structure autour d'un longeron unique, se caractérisait par une très grande flexibilité dans le sens de l'envergure.
A-Spatz (la roue est
démontable et uniquement utilisée pour les
manoeuvres au sol)
Le premier vol du A-Spatz eut lieu à Dachau le 12 mars 1952. L'évaluation des performances mit en évidence de remarquables qualités voilières et une maniabilité surprenante ; cette dernière était cependant associée à une faible stabilité transversale qui rendait le pilotage délicat. En fait le A-Spatz se voulait la version monoplace du Bergfalke I qui permettait la transition entre le planeur d'école et le planeur de lâcher avec un minimum de dépaysement pour l'élève pilote. Une dizaine de A-Spatz furent construits et vendus tant en Allemagne qu'à l'exportation. Il apparut cependant, en cours d'utilisation, que la souplesse des ailes engendrait à vitesses élevées des phénomènes de flutter et de torsion susceptibles de produire une rupture des ailerons.
Le A-Spatz 00-SZA de l'Aéro-Club de la Sabena
A-Spatz utilisé en Belgique et
notamment au Centre de Saint-Hubert
La rigidification du longeron et
un nouvel aménagement du poste de pilotage donna lieu
à la définition du B Spatz qui fut construit
à environ 40 exemplaires.
En 1953, Scheibe présenta une version modifiée dans le sens de la nouvelle réglementation de la FAI qui définissait la classe standard. Un fuselage de B-Spatz associé à une voilure de 15m d'envergure fit naître le L-Spatz. Le L de Leistung (performance) traduisait en fait le gain de 2 points réalisé sur la valeur de la finesse maximale qui passait à 27. Une quarantaine de L-Spatz furent fabri-qués entre 1953 et 1955
La principale des versions du Spatz, le L-Spatz 55, vit le jour en 1955. Ce modèle se différenciait de ses prédé-cesseurs par la position haute de la voilure ; cette modification, mineure en apparence procurait un accroissement sensible de la stabilité en roulis. Il devait en résulter une amélioration très nette de l'agrément de pilotage, d'autre part le faible prix de vente et la possibilité qu'offrait Scheibe de livrer son planeur sous forme de "boîte de construction péfabriquée" suscita un vif intérêt dans les aéro-clubs. C'est ainsi qu'entre 1955 et 1962, 300 L-Spatz furent livrés à la clientèle nationale et étrangère mais, malgré des qualités certaines et un prix de vente défiant toute concurrence, le Spatz ne fut jamais en mesure de s'imposer face au Ka 8b généralement préféré pour son pilotage plus classique et plus harmonieux.
L-Spatz 55 de construction Scheibe
La licence de fabrication du L-Spatz 55 fut acquise en 1960 par la société Avialsa d'Haguenau. Le modèle français, rebaptisé A 60 Fauconnet, se distinguait par un profilage plus soigné du fuselage réalisé au moyen de lisses supplémentaires et de l'habillage du nez par une coque en polyester. La verrière à montants métalliques était remplacée par une bulle en plexiglas moulé. La voilure présentait un bord marginal franc garni d'une petite cloi-son verticale chargée de protéger l'intrados et l'aileron du contact du sol. L'introduction en France du Spatz correspondait en fait à un besoin exprimé par les aéro-clubs qui étaient en train de pourvoir au remplacement des vieilles machines issues des dotations d'après-guerre et dont la vétusté commençait à se faire sentir (Nord1300, Nord 2000, Air 100, SA 104 Emouchet, Castel C 301S, C 310, C 311P etc...). L'attribution exclusive des primes d'achat aux matériels construits en France réduisait à trois options le choix possible : le Wassmer "Super-Javelot", le M 100 Mésanged'origine italienne mais construit en France par CARMAM et l'Avialsa A 60 Fauconnet. Ces trois machines bien que de performances sensiblement équivalentes présentaient des arguments commerciaux différents. Le faible prix de vente proposé par Avialsa constitua l'atout majeur du Fauconnet sur le marché français. 155 A 60 furent construits par Avialsa entre 1961 et 1970 et 15 par Rocheteau entre 1974 et 1980.
A 60 Fauconnet construction
Rocheteau Aviation
Les modifications de structure appliquées sur le L-Spatz 55 furent reprises par Scheibe sur un nouveau modèle désigné L-Spatz III. Après une série de 30 exemplaires réalisée entre 1965 et 1966, le développement du Spatz fut définitivement arrêté.
Description technique (A 60)
Le fuselage est constitué d'un treillis de tubes d'acier soudés dont la section évolue du rectangle (à l'avant) vers le triangle pointe en bas. La structure est recouverte à l'avant par une coque en polyester moulé et habillée, tout au long du fuselage, par des lisses en bois qui ovalisent la section. Le poste de pilotage est à l'image de l'ensemble simple et rustique : le pilote est assis sur un siège en contre-plaqué sur lequel s'articule un dossier réglable ; la disposition des commandes est classique mais on note que la position des palonniers n'est pas ajustable. Les timoneries de commandes sont rigides pour la profondeur et l'inclinaison et souple pour la direction. Le train d'atterrissage est composé d'un patin en frêne assisté d'un ressort à boudin, d'une roue fixe semi-encastrée et dépourvue de frein, d'une béquille en acier amortie par un bloc de caoutchouc. L'ensemble du fuselage est entoilé à l'exception de la partie recouvrant la jonction des ailes qui est constituée d'un capotage en tôle.La voilure, divisée en deux parties, est rectangulaire sur le tiers de l'envergure puis trapézoïdale. Le profil du type Mü 14 % ne subit aucune évolution ni vrillage le long de l'envergure. L'aile est construite autour d'un longeron unique constitué par des semelles en hêtre lamellée réunies par des âmes en contre-plaqué. Sur le longeron viennent se coller les becs et les queues de nervures réalisés en treillis de baguettes de spruce. Le bord d'attaque est coffré jusqu'au longeron pour constituer un caisson résistant en torsion ; l'ensemble de la voilure est entoilé. Les aérofreins du type DFS se déploient à l'intrados et à l'extrados. Le positionnement des ailes sur le fuselage est obtenu au moyen de quatre tétons en acier ; l'assemblage des ailes est réalisé au moyen d'un axe vertical unique qui traverse les ferrures placées aux extrémités des longerons. Les empennages sont construits en bois : les parties fixes sont coffrées en contreplaqué, les parties mobiles sont entoilées. Le gouvernail de profondeur n'est pas compensé.
Le kit du Fauconnet tel qu'il
était livré par Avialsa
La structure du Fauconnet
n°6 F-CCLB, assemblé à partir du kit,
avant entoilage et peinture
On remarque la position de la
prise de pression dynamique et du crochet de remorquage
Structure en tube du fuselage et
fixation des ailes
La gouverne de profondeur est
dépourvue de compensateur aérodynamique
Aérofreins DFS se
déployant à l'intrados et à l'extrados
Impression de vol
Incontestablement le Fauconnet n'est pas de ces planeurs qui laissent leurs pilotes indifférents : certains l'adorent, d'autre l'abhorrent. Sa légèreté et sa maniabilité en font un planeur très vivant qui répercute à son pilote toute l 'amplitude des mouvements atmosphériques. Ce comportement particulier et l'instabilité en roulis, due probablement à l'absence de vrillage en bout d'aile, exigent une période d'accoutumance plus ou moins longue suivant le tempérament du pilote. Lorsque l'adaptation de l'homme à la machine est réalisée et que la maîtrise du pilotage est acquise, le Fauconnet apparaît comme l'un des plus fantastiques voiliers qui ait jamais existé. Sa faible vitesse de chute et sa charge alaire réduite lui permettent d'évoluer en spirales de très faible rayon et d'exploiter au mieux la partie la plus active des ascendances. En contre partie le pilotage devient délicat voire "pointu" par vent fort ou en atmosphère turbulente.
Caractéristiques
envergure : 15 m
longueur : 6.25 m
surface : 11.7 m2
allongement : 18.9
profil : Mü 14%
masse à vide : 155 kg
masse maximale : 265 kg
charge alaire : 22.6 kg/m2
vitesse maximale : 175 km/h
vitesse de décrochage 55
km/h
chute minimale : 0.68m/s
à 64 km/h
finesse maximale : 27 à
73 km/h
premier vol : 1955
nb d'exemplaire construits :450
La succession du Spatz
En 1961, Scheibe entreprit de développer le SF 26 qui constituait une version du Spatz, améliorée au niveau aérodynamique. Le fuselage gardait les éléments essentiels de celui de son prédécesseur mais la partie avant était carénée, jusqu'au bord de fuite de l'aile, par une coque en plastique moulé. La voilure composée de trois parties adoptait un profil laminaire NACA 63-3-616. L'ensemble de ces modifications donnait au SF 26, sur-nommé Super Spatz, une finesse de 30. Environ 50 SF 26 furent construits entre 1962 et 1964.
Après l'échec du
L-Spatz III, Scheibe
abondonna définitivement ce modèle au profit d'un
développement du S F 27
Le Loravia LCA 10 est la version
française du Scheibe SF 27 Zugvogel V